Comment améliorer l’accès de tous les Français aux soins visuels ? Quel nouveau modèle organisationnel de la filière pour fluidifier le parcours de soins ? Au-delà du débat actuel et des pistes qui pourraient être étudiées par les pouvoirs publics, la répartition démographique et géographique des 3 « O » montre que la solution passe par les opticiens et les orthoptistes dotés de compétences élargies.

Selon les données publiées par la Drees (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques)*, en 2020, on compte 40 783 opticiens, un effectif en progression de +6% par rapport à 2019, 5 506 orthoptistes, en hausse de +6% également, et 5 850 ophtalmologistes, en croissance de +0,5%. On dénombre 61 opticiens, 8 orthoptistes et 9 ophtalmologistes pour 100 000 habitants.

Des déséquilibres démographiques tenaces

Les déséquilibres démographiques entre les 3 « 0 » se confirment d’année en année. Avec des pyramides des âges exactement inverses pour les 3 professions : 62% des opticiens et 57% des orthoptistes ont moins de 40 ans. A l’inverse, ce sont 45% des ophtalmologistes (presque 1 ophtalmologiste sur 2) qui ont plus de 60 ans. Ces données démontrent, comme le souligne le dernier rapport de l’Igas (Filière visuelle : les lignes bougent enfin), que « la filière demeure pour le moment extrêmement contrainte par la démographie des ophtalmologistes, ce qui ne permet pas de prendre en charge beaucoup plus de patients, notamment chez les amétropes ».

Démographie des 3 « O » en 2020

Démographie 3 "O" au 1er janvier

Source : Répertoire ADELI- Drees, données 2020 – crédit : Bien Vu

Résoudre les inégalités géographiques d’accès aux soins

Et si les mesures prises jusqu’alors (développement du travail aidé, décrets Opticiens et Orthoptistes sur le renouvellement des équipements) n’ont pas suffi pour résorber les délais moyens d’attente chez les ophtalmologistes (43 jours en 2019, selon l’étude de CSA pour le Snof) , elles ont encore moins résolu le problème des inégalités géographiques.

Carte des 3 « O » en France

Passez sur les départements pour obtenir les données des 3 professions, opticiens, orthoptistes, ophtalmologistes (effectifs et densité pour 100 000 habitants)

La variation d’intensité des couleurs (du plus foncé au plus clair) correspond à une densité plus ou moins forte des professionnels pour 100 000 habitants. On constate qu’il n’y a pas de départements en forte pénurie d’opticiens. En revanche, certains départements affichent un déficit important d’ophtalmologistes et d’orthoptistes (en plus clair).

La variation d’intensité des couleurs (du plus foncé au plus clair) correspond à une densité plus ou moins forte des professionnels pour 100 000 habitants. On constate qu’il n’y a pas de départements en forte pénurie d’opticiens. En revanche, certains départements affichent un déficit important d’ophtalmologistes et d’orthoptistes (en plus clair).

La variation d’intensité des couleurs (du plus foncé au plus clair) correspond à une densité plus ou moins forte des professionnels pour 100 000 habitants. On constate qu’il n’y a pas de départements en forte pénurie d’opticiens. En revanche, certains départements affichent un déficit important d’ophtalmologistes et d’orthoptistes (en plus clair).

A noter : la situation des Drom (Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion et Mayotte) qui ne figurent pas sur cette carte est assez contrastée. Etonnamment, les 2 départements des Antilles ont une densité d’ophtalmologistes dans la moyenne nationale (7 et 9 pour 100 000 habitants), mais largement en dessous pour les opticiens (48 et 45). De leur côté, Guyane, Réunion et Mayotte, sont sous-dotés dans les 3 professions. Seule exception, une forte densité d’orthoptistes à La Réunion (10 pour 100 000 habitants).

Source : Répertoire ADELI- Drees, données 2020 – Carte et crédit : Bien Vu

Actuellement, 19 départements sont en densité forte d’ophtalmologistes (supérieure à la moyenne de 9 ophtalmologistes pour 100 000 habitants), 26 en densité moyenne (8 ou 9 ophtalmologistes pour 100 000 habitants) et 56 en densité faible.

On observe des écarts très significatifs : sans grande surprise, les densités les plus fortes se concentrent dans les départements du Sud-Est et du Sud-Ouest, dans le Rhône, certains départements de la petite couronne parisienne et la capitale, bien sûr, avec une « surpopulation » de médecins. A l’inverse, ce sont les départements avec de plus petites agglomérations qui souffrent d’un déficit criant de spécialistes (Creuse, Lozère, Meuse, etc.).

On le voit, l’accès aux soins est bien avant tout une problématique territoriale. La variation des densités des orthoptistes suit à peu de choses près celle des ophtalmologistes. En revanche, à quelques exceptions, les départements en pénurie d’ophtalmologistes affichent une densité moyenne d’opticiens. Leur nombre et leur maillage territorial complet sont donc les meilleurs arguments pour une réorganisation de la filière qui les intègrent comme porte d’entrée du patient dans la filière (Qui va prendre en charge les amétropes d’ici 5 ans).

Le profil des 3 « O » en chiffres

Opticiens

40 783

38,5 ans

61 pour 100 000 ha

57,4% de femmes

24,6% de propriétaires

75,4% de salariés

Orthoptistes

5 506

39,6 ans

8 pour 100 000 ha

88,2% de femmes

58,8% libéraux ou mixtes

Ophtalmologistes

5 850

53,8 ans

9 pour 100 000 ha

44% de femmes

85% libéraux ou mixtes

*Répertoire ADELI- Drees, données au 1er janvier 2020. Le champ statistique de la Drees recouvre la France métropolitaine et DROM. Pour les ophtalmologistes, sont comptabilisés l’ensemble des actifs, y compris les médecins en cumul emploi-retraite et les remplaçants (2 catégories qui n’ont cessé d’augmenter ces dernières années).