L’obligation vaccinale qui s’applique à chacun d’entre vous (employeurs, collaborateurs diplômés ou non, alternances et stagiaires) à partir du 16 octobre prochain suscite beaucoup de questions pratiques. Elle n’est pas sans conséquences sur la relation de travail entre employeur et employé et dans l’organisation même du magasin. Comment gérer cette situation inédite ? Quelles sont vos responsabilités et vos droits ?
Bien Vu a interrogé Isabelle Pontal, avocate en droit social et experte en relations employeur/salarié au sein du cabinet d’avocats d’affaires FTMS.
Schéma vaccinal complet obligatoire, pass sanitaire, cas particulier de contre-indication, situation des collaborateurs non salariés… Face à une situation sans précédent, nombre d’opticiens s’interrogent sur la mise en place de l’obligation vaccinale à laquelle ils sont soumis en cette rentrée et sur ses implications. Que dit la loi précisément ?
La loi a été publiée le 5 août dernier avec un décret (2021 – 1059) et un arrêté en date du 7 août, après avis de la Cnil et de la HAS (Haute Autorité de santé). En pratique, l’obligation vaccinale s’applique à tous les professionnels de santé inscrits au livre IV du Code de la santé publique (dont font partie les opticiens-lunetiers) et à tous les personnels travaillant en magasin d’optique : collaborateurs diplômés ou non, qu’ils soient salariés ou auto-entrepreneurs, étudiants en contrat d’alternance ou stage.
« L’obligation vaccinale concerne les opticiens, collaborateurs salariés ou non, étudiants en alternance ou stage, y compris les femmes enceintes à partir du 2e trimestre de grossesse »
Sa mise en place suit un calendrier précis en 3 étapes (lire encadré ci-contre). A partir du 16 octobre, seules échappent à l’obligation les personnes présentant un certificat de rétablissement du Covid-19 de moins de 6 mois et celles qui ont des contre-indications médicales. La grossesse n’en est pas une et l’obligation concerne les femmes enceintes à partir du 2e trimestre de grossesse.
Concrètement, que se passe-t-il pour l’employeur comme pour le salarié en cas de non-respect de cette obligation ?
Je tiens à souligner qu’un employeur ne peut imposer à un salarié la vaccination. C’est la loi qui les oblige tous les 2. Attention aussi à ne pas confondre obligation vaccinale et pass sanitaire qui, d’ailleurs, ne s’applique pas aux clients quand ils vont chez un opticien. La loi pose une limite dans le temps (15 novembre) pour ce dernier seulement, au-delà de laquelle le gouvernement devra repasser devant la représentation nationale.
« Un employeur ne peut imposer à un salarié la vaccination. C’est la loi qui les oblige tous les 2. Mais l’employeur est responsable du respect de la loi »
En cas de non-respect de l’obligation vaccinale par un collaborateur, l’employeur doit l’informer des conséquences : interdiction de continuer à exercer, suspension du contrat de travail (pour les CDD comme pour les CDI) et donc interruption de la rémunération. Tout cela cesse le jour où le collaborateur aura décidé de respecter l’obligation vaccinale. Il peut entre-temps avec l’accord de l’employeur recourir à des jours de congés payés ou de repos. Sachant néanmoins que cela aura évidemment une limite dans le temps.
Que risque l’employeur s’il ne contrôle pas ses collaborateurs ?
Dans ce cas (ou s’il ne respecte pas pour lui-même l’obligation vaccinale), il s’agit d’une contravention de 5e classe (article 16 de la loi) passible d’une amende de 1 500 à 3 000 € en cas de récidive dans un délai d’un an. Si cette violation est verbalisée à plus de 3 reprises dans un délai de 30 jours, les faits sont punis d’un an d’emprisonnement et de 9 000 € d’amende pour les personnes physiques et 45 000 € pour les personnes morales.
« Pour qu’il y ait à terme un licenciement, l’employeur devra démontrer qu’il n’a pas pu recruter un autre collaborateur ou trouver une organisation viable pendant l’absence du salarié non vacciné »
Le non-respect de l’obligation peut-il être un motif de licenciement du salarié ?
Pas directement. L’employeur a toujours la possibilité de proposer un reclassement sur un autre poste. Mais c’est difficile en magasin et cela peut impliquer une modification du contrat de travail qui doit être soumis à l’accord du salarié. Si, à terme, licenciement il y a, il faudra que l’employeur puisse démontrer rigoureusement qu’il n’a pas pu mettre en œuvre une autre organisation pendant l’absence du salarié concerné ou recruter un autre collaborateur, le temps de la suspension de son contrat.
Isabelle Pontal,
avocate en droit social et experte en
relations employeur/ salarié
au sein du cabinet d’avocats d’affaires FTMS
Votre calendrier de l’obligation vaccinale
Pour continuer à exercer…
- Depuis le 9 août et jusqu’au 14 septembre 2021 inclus, si votre schéma vaccinal n’est pas complet, vous avez la possibilité de présenter un certificat de rétablissement datant de moins de 6 mois ou un test de non contamination (PCR ou antigénique de moins de 72 h) ou un certificat médical de contre-indication ;
- A compter du 15 septembre et jusqu’au 15 octobre 2021 inclus (date d’entrée en vigueur de l’obligation vaccinale) : vous devez justifier de l’administration d’au moins une des doses requises dans le cadre du schéma vaccinal à plusieurs doses et présenter le résultat d’un test de non contamination, ou montrer un certificat de rétablissement datant de moins de 6 mois ou un certificat médical de contre-indication ;
- A compter du 16 octobre 2021 : vous devez présenter un schéma vaccinal complet ou un certificat de rétablissement datant de moins de 6 mois ou un certificat médical de contre-indication.