Avec -36% sur les 4 premiers de 2020*, l’optique fait partie des secteurs les plus touchés de l’économie française. Au point que les prévisions pour l’ensemble de l’année oscillent entre -20% et -35%. En cause, l’arrêt quasi-total de l’activité pendant 2 mois, bien sûr. Mais cette chute vertigineuse partagée par l’ensemble de l’économie française fait suite aux 3 premiers mois de l’année très difficiles pour les opticiens. A titre de comparaison, selon l’Observatoire économique de l’Institut français de la mode (IFM), le secteur du textile et de l’habillement, en recul structurel depuis une dizaine d’années, pourrait afficher fin 2020 une baisse entre -17% et -25%.
Un « décrochage » de l’optique dès janvier
Spécificité de l’optique : la baisse du marché s’amorce dès le mois de janvier, avec, en moyenne, un recul du CA des magasins de -13%. Conséquence de la mise en place de la réforme 100% Santé et des bugs occasionnés. Ce premier choc subi par les magasins d’optique, en partie prévisible, est à peine compensé par le mois de février (+2,5%). Résultat, fin mars, le marché enregistre déjà une chute de son CA de -30% et fin avril de -36%.
Une perte moyenne de plus d’un tiers du CA
Quelle est la variation de votre CA sur les 4 premiers mois de 2020 vs 2019 ?
Source : Bien Vu – Crédit Bien Vu
-16,8% pour le textile-habillement
Autre secteur soumis aux aléas d’une conjoncture défavorable (mouvement des gilets jaunes, grèves contre la réforme des retraites), le textile et l’habillement ont également abordé le mois de mars avec une tendance baissière : -4,9% en janvier, -5% en février. « Il faut attendre néanmoins le mois de mars pour observer le décrochage avec -53%. Ce qui donne, pour le premier trimestre, un repli de -16,8% », explique Gildas Minvielle, directeur de l’Observatoire économique de l’Institut français de la mode. Qui estime ce pourrait être le bilan 2020 des acteurs du textile et de l’habillement, en esquissant 3 scénarios plus ou moins optimistes : -17% avec un second semestre identique à celui de 2019, -20% si les 6 prochains mois affichent -5%, -25% avec une consommation en forte baisse de juillet à décembre 2020 (-10% par rapport à la même période en 2019).
Des résultats en baisse pour le textile-habillement quel que soit le type de commerce
Source : IFM – Crédit Bien Vu
Le comportement des consommateurs au centre du jeu
« Aucun de ces scénarios n’est impossible. La grande inconnue reste la progression des ventes en ligne (15% du marché évalué à 30 milliards €), qui peut être un relais de croissance tant pour les pure players que pour les magasins traditionnels et faire basculer d’un scénario à l’autre », précise Gildas Minvielle. « En avril, ces ventes en ligne ont progressé de +4,5%, ce qui n’a pas été suffisant. »
Tout dépend donc pour le textile-habillement du comportement des consommateurs : « De nombreux éléments nous incitent à la prudence : la tendance déjà bien visible avant la crise à une consommation plus raisonnée, les aspirations environnementales et sociétales des clients, la pression sur le pouvoir d’achat et la hausse des dépenses contraintes qui conduisent à des arbitrages défavorables aux vêtements », analyse Gildas Minvielle. « A cela s’ajoute l’accélération de phénomène comme le marché de seconde main. »
Ces facteurs pèsent également pour partie sur la relance du marché optique. Une reprise à 100% du secteur qui ne doit pas se faire trop attendre. Interrogés au début du mai dans le cadre de notre enquête exclusive*, 64% des propriétaires et directeurs de magasins d’optique estiment en effet qu’il leur sera très difficile de continuer en l’état au-delà de 3 mois, compte tenu de leur trésorerie mise à mal. Une situation qui présage, si le CA ne rentre pas dans les prochaines semaines, de réductions de personnel voire de fermetures.
* Enquête quadrimestrielle Bien Vu par questionnaire envoyé début mai aux opticiens, propriétaires et directeurs de point de vente, ce qui représente 337 magasins (58% indépendants, 36% sous enseigne, 2% mutualistes, 4% multipropriétaires ayant des points de vente à la fois sous enseigne et indépendants).